Pourquoi choisir le métier de manager de transition – et quels en sont les prérequis ?
Vu par beaucoup comme une activité temporaire, le management de transition est considéré par le cabinet CAHRA comme un métier à part entière. Cela induit, notamment, que l’on puisse se former pour devenir manager de transition – et exercer avec une acuité accrue au fil des missions. Mais sait-on vraiment ce qui pousse un nombre grandissant de cadres dirigeants à vouloir devenir à leur tour managers de transition ? Nos éléments de réponse.
Article rédigé avec le concours de Vincent Moulay et Frédéric Decaix, managers de transition CAHRA.
Le management de transition – un choix guidé par des motivations similaires ?
Le parcours professionnel préalable des actuels managers de transition se révèle très diversifié. C’est aussi le cas du profil de ces ex-cadres dirigeants. Si, pour certains, le management de transition s’est imposé rapidement, parfois de façon inattendue, pour d’autres le choix de cette nouvelle voie a nécessité une longue maturation. Pour des raisons propres aux cadres dirigeants eux-mêmes, ou au système ! C’est ce que nous confie Vincent Moulay, qui a rejoint le cabinet CAHRA en juin 2022.
« J’ai commencé à m’intéresser au management de transition il y a dix ans, après un parcours éclectique : ingénieur de formation, j’ai œuvré dans l’industrie, dans un cabinet de conseil et dans la distribution de matériels haut de gamme à forte technicité. J’ai également été chef d’entreprise (direction d’un Promocash en tant que franchisé) et ai dirigé un Monoprix. Au total, j’ai travaillé avec plus de 35 franchises, puis avec des fonds d’investissements ! Je ne me suis jamais installé dans une zone de confort, étant animé par la volonté de découvrir et d’apprendre. »
Sans doute perçoit-on déjà, via ces multiples expériences, le penchant naturel de Vincent Moulay pour le management de transition. Avant même d’exercer ce métier, il en appréciait certains aspects, à savoir : la possibilité de travailler dans le cadre de missions successives, et de découvrir des entreprises aux modes de fonctionnement et aux environnements de travail bien distincts. L’objectif d’accompagner lesdites entreprises, afin qu’elles gagnent en efficacité et progressent, lui semblait également très stimulant.
En revanche, il y a dix ans, le management de transition était encore considéré comme la chasse gardée des cadres dirigeants en fin de carrière. Ces derniers l’exerçaient par ailleurs, le plus souvent, en indépendants. Vincent Moulay poursuit : « J’étais trop jeune – 37 ans – pour être pris au sérieux. La diversité de mes expériences, sur un temps restreint, inquiétait plus qu’elle ne convainquait ! Sachant qu’en France, on fait davantage confiance à de longues périodes d’exercice, dans un même secteur et une même fonction, qu’à des expériences courtes et de forte intensité qui permettent pourtant d’avoir une vision globale de l’entreprise ». C’est finalement par le biais du Cercle du Management de Transition, qui informe les managers sur le marché et les différents cabinets, que Vincent Moulay a assisté à un webinar animé par Emmanuel Buée, le fondateur de CAHRA[1]. « L’humain et la bienveillance le guidaient, c’était palpable. Me retrouvant pleinement dans ces valeurs, j’ai contacté CAHRA via Régis Gouraud, directeur Grand Ouest au sein du cabinet. Et me voilà ! »
Un autre type « d’entrée » sur le marché du management de transition
Également manager de transition, Frédéric Decaix a effectué sa première mission pour CAHRA il y a peu. Précédemment, il a travaillé durant 25 ans dans le secteur agro-alimentaire – en production, maintenance ou direction. En 2020, à la suite d’un burn-out, il décide de changer de cap pour réaliser son rêve d’enfant : devenir ostréiculteur. Au bout de deux ans et demi d’activité, il comprend qu’il ne parviendra pas à gagner sa vie. « Je me suis donc remis sur le marché de l’emploi, et CAHRA m’a contacté. La proposition de mission qui m’a été faite me convenait tout-à-fait ! ». Notamment pour la forte composante humaine qu’elle allait inclure, au-delà des enjeux organisationnels. Ces derniers comportent d’ailleurs, toujours, une dimension humaine significative. Et c’est ce qui dote le management de transition, et les missions dédiées, d’un supplément de sens.
Quelles sont les caractéristiques de ce métier ?
Selon Frédéric Decaix, la richesse des expériences préalables est le principal prérequis pour devenir manager de transition. Cela n’implique pas toujours un âge avancé, bien que les 50-59 ans représentent 54 % des effectifs en 2023[2] en France (pour 25 % de 40-49 ans).
« Le fait de pratiquer la bienveillance m’apparaît aussi comme un critère décisif. Cette bienveillance est souvent accrue par une épreuve vécue précédemment : c’est le cas d’un certain nombre de managers CAHRA, qui ont connu un incident de parcours. » La remise en question qui peut s’ensuivre conduit alors ces cadres dirigeants sur la voie du management de transition. Sachant que le sens que comporte chaque mission constitue également un puissant moteur !
Comme le souligne Frédéric Decaix, « un manager de transition arrive souvent dans un environnement où des problèmes humains – et/ou organisationnels – se manifestent. L’un des enjeux est de trouver des solutions pour réduire la souffrance que l’on observe ». Or, même si de nombreux managers d’entreprise ont conscience de l’importance de l’humain, pris par d’autres impératifs ils y consacrent rarement le temps nécessaire. À l’inverse, la vaste expérience dont disposent les managers de transition leur permet d’aller plus vite sur certains sujets techniques, au profit des relations humaines.
D’autres éléments sont à noter : l’absence de lien hiérarchique au sein de l’organisation dans laquelle la mission se déroule, et sa durée définie dans le temps. Pour Frédéric Decaix toujours, « les pas de côté prônés par CAHRA, qui visent la prise de recul et l’analyse des situations en changeant d’angle, s’en trouvent facilités ». Le système peut ainsi être observé plus objectivement et les principaux nœuds, identifiés. Ou encore, les personnes clés susceptibles d’impulser une dynamique de changement. « Si le lien hiérarchique structure l’organisation, il enferme la pensée. »
Pour la libérer, précisément, l’autonomie dont dispose le manager de transition s’avère décisive – tout comme le fait de co-construire les solutions avec les équipes, autant que possible. La stimulation intellectuelle est par ailleurs intense, avec la découverte de nouvelles équipes, de nouveaux process et environnements de travail, lors de chaque mission. Quant à l’humilité, elle doit être « intrinsèque » – selon Vincent Moulay. « Car l’expertise sectorielle se trouve dans l’entreprise. Et la confiance dans les équipes est primordiale. En leur facilitant le travail, elles pourront donner le meilleur d’elles-mêmes. L’humain est un fabuleux levier de croissance pour les organisations. »
Des points de vigilance à ne pas négliger
Qui dit manager de transition, dit réactivité ! Les débuts de Vincent Moulay « dans le métier » en témoignent : sa première mission de transition a commencé deux jours après le partage des informations. Elle s’est par ailleurs déroulée en Bretagne, alors qu’il habite à Lyon… Un deuxième point de vigilance donc – la mobilité géographique dont il faut faire preuve. Sachant que le rajeunissement des managers de transition – bien qu’encore limité – peut induire des responsabilités familiales encore prégnantes, quand des professionnels plus âgés en sont dégagés. Certains managers de transition évoquent pour leur part la tension que peut engendrer une mission très éloignée de leur domicile sur leur vie familiale.
Un autre aspect a tendance à être minoré, tant qu’il n’a pas été expérimenté. Il s’agit des phases d’intermission, une intervention ne succédant pas directement à une autre en général. Passer d’une intensité XXL en matière d’activité – au cœur d’une mission de transition – à une période plus ou moins longue d’attente d’une nouvelle proposition, peut s’avérer délicat à divers titres (inquiétude sur l’avenir, baisse de revenus – selon le type de statut du manager de transition[3]).
Différents motifs conduisent des cadres dirigeants à se lancer dans l’aventure du management de transition. En toute hypothèse, le désir d’exercer un métier extrêmement stimulant intellectuellement, où l’on apprend sans cesse, est un dénominateur commun – tout comme le souhait d’investir en profondeur le champ des relations humaines. Chez CAHRA, deux valeurs guident par ailleurs les managers de transition : le respect et l’attention accordés aux femmes et aux hommes de l’entreprise dans laquelle les managers interviennent, et la bienveillance qui sous-tend chacune de leurs actions.
[1] Fondateur de CAHRA, Emmanuel Buée a dirigé le cabinet avant d’en devenir président en 2020 (Steven Poinot devenant alors directeur général). Décédé en 2022, Emmanuel a imprimé les valeurs qui lui tenaient à cœur dans l’ADN de CAHRA. Il a aussi positionné le cabinet comme un acteur en pointe en matière d’approches managériales innovantes – fondées sur l’intelligence émotionnelle, relationnelle et systémique -, et de travail collaboratif.
[2] Source : baromètre des managers de transition en France, élaboré par France Transition.
[3] Le modèle de CAHRA est particulier car le cabinet salarie ses managers de transition. Ces derniers peuvent exercer leur activité en CDI, avec une innovation managériale toute récente : le CDI agile.